On Green Dolphin Street

Nous nous penchons encore une fois sur un grand classique, un standard incontournable issu du film d’un même nom : On Green Dolphin Street. La première récupération Jazz connue est celle de Miles Davis dans un EP de 1958. Mais quarante ans plus tard, on découvre que c’est en réalité le trompettiste Chet Baker qui l’a enregistré avec une formation Jazz pour la première fois en 1957.

Chanson aux paroles assez peu développées, c’est sa structure harmonique qui séduit les jazzmen, ainsi que sa grande capacité d’improvisation avec ses enchaînements d’accords intuitifs.

Comme d’habitude, je vous ai préparé une liste non-exhaustive de mes versions préférées de cet immense standard.

La playlist de l’emission :
  1. Miles Davis Quintet – Live in Europe 1967
  2. Herbie Hancock – The Piano, 1979
  3. George Shearing Quintet & Nancy Wilson – The Swingin’s Mutual, 1961
  4. Steps Ahead – Vibe, 1995
  5. George Benson & Count Basie Orchestra ‎– Big Boss Band, 1990
  6. Chet Baker – Embraceable You, 1995, enregistré en 1957

Vous pouvez réécouter la playlist avec des versions bonus sur Soundsgood :

Retranscription de l’episode 4 : On Green Dolphin Street

Bonjour à toutes et à tous ! Ou bonsoir peut-être… peu importe, quoique vous fassiez, ou que vous soyez, j’espère que l’espace-temps dans lequel vous avez choisi d’écouter ce podcast est confortable et que vous être prêt à recevoir votre dose bimensuelle de jazz.

Pour cet épisode j’ai choisi le standard On Green Dolphin Street. Bravo à Antoine qui l’a reconnu rien qu’en regardant sa partition. Si vous aussi vous voulez essayer de deviner le prochain épisode, ça se passe sur la page Facebook Version Standard.

Le titre un peu loufoque de ce morceau vient du film américain du même nom qu’on traduit chez nous comme « Le Pays du Dauphin Vert ». C’est l’histoire de deux sœurs qui tombent amoureuses du même homme. Celui-ci part habiter en Nouvelle-Zélande, mais décide de demander en mariage l’une des deux sœurs en lui envoyant lettre. Le risque avec ce genre de procédé, c’est qu’il se trompe de prénom et c’est la mauvaise sœur qui part le rejoindre là-bas. Je n’ai pas regardé le film pour préparer l’émission, donc je ne suis pas sûr d’avoir très bien compris le rapport avec un dauphin vert…

Bon de toute façon ce qui nous intéresse ici avant tout c’est la musique. On Green Dolphin Street, énième musique de film qui devient un standard lorsque Miles Davis décide de le reprendre en 1958. On va donc commencer avec une version live, enregistrée il y a 50 ans à paris, dans la belle salle Pleyel avec Miles Davis et son Quintet :

Miles Davis Quintet – Live in Europe 1967

C’était le 6 novembre 1967 à Paris. Le quintet de Miles Davis fait escale à la salle Pleyel pendant sa tournée en Europe. Les musiciens américains aimaient beaucoup venir jouer en France devant un public de connaisseurs, qui applaudissent consciencieusement chaque solo. Ce quintet (composé donc par définition de 5 musiciens) est celui qu’on appelle le deuxième grand quintet de Miles Davis. On a pu entendre les solos de Wayne Shorter au saxophone puis Herbie Hancock au piano, qui improvise en dernier avant de laisser Miles Davis reprendre la mélodie à la trompette.

Dès le premier épisode de Version Standard, je vous avais parlé de l’influence de Miles Davis. Chacun des noms que j’ai cités a eu une brillante carrière solo. On va d’ailleurs revenir sur Herbie Hancock. Un peu comme Keith Jarrett, ce pianiste met sa formation de concertiste classique au service de folles explorations musicales. Lui qui a mêlé le jazz au rock à la funk ou à la disco, il revient à une formule très intimiste dans la version que je vais passer. Dans son album intitulé sobrement « The Piano », il enregistre sept pistes exclusivement en piano solo. Et il rejoue notamment On Green Dolphin Street, plus de vingt ans après le live avec Miles Davis. Entre temps, il a beaucoup muri et sa conception du morceau a radicalement changé. Je vous laisse apprécier la délicatesse du jeu d’Herbie Hancock.

Herbie Hancock – The Piano, 1979

George Shearing Quintet & Nancy Wilson – The Swingin’s Mutual

George Shearing et son quintet accompagnait la jeune Nancy Wilson en 1967. C’était son troisième album dans sa discographie, qui compte désormais plus d’une soixantaine de disques… Cet album est très justement intitulé : « The Swingin’s Mutual » qu’on pourrait traduire par « Mais tout le swing est pour moi »… Un bel échange de politesse ponctué d’un swing rebondissant impulsé par cette entêtante ligne de basse et par le vibraphone.

On va continuer avec cet instrument dans la prochaine version. Dans cet enregistrement, le vibraphone n’est pas utilisé comme un accompagnement guilleret, mais c’est un des instruments solistes. Le groove est au centre de la musique du groupe Steps Ahead. Très utilisé en jazz, le vibraphone croise ici une grosse ligne de basse en slap, cette technique qui consiste à frapper ou pincer très fort les cordes de la basse. Au saxophone, c’était Michael Brecker le membre historique du groupe. Mais dans cet album de 1995, c’est Donny McCaslin qui le remplace. A l’époque, il vient à peine de se faire un nom dans le monde de la musique. Aujourd’hui c’est une star du milieu, ou plutôt une « Blackstar » je devrais dire, pour reprendre le nom l’album de David Bowie sur lequel il apparaît également. Son solo sur cette version d’On Green Dolphin Street est époustouflant.

Steps Ahead – Vibe (1995)

George Benson & Count Basie Orchestra ‎– Big Boss Band (1990)

Celui qu’on appelle aussi « le plus pop des jazzmen », George Benson était accompagné par le fameux Count Basie Orchestra. Dix ans après son tube « Give Me the night », son album « Big Boss Band »  sonne comme un retour aux sources pour le guitariste. Il adopte un timbre de voix qui sonne un peu plus crooner qu’à son habitude. Mais cette version est aussi très moderne, avec ce riff grave tenu par les cuivres. Tout cela donne un curieux mélange qu’on aurait bien du mal à dater… George Benson défie les barrières des genres et du temps.

Voilà pour cet épisode 4, j’espère qu’il vous a plu ! Si c’est le cas vous savez déjà ce que vous pouvez faire : rejoignez la page Facebook Version Standard ou le compte Twitter du même nom. Toutes les informations et quelques surprises sont sur les réseaux sociaux et sur le site VersionStandard.fr. Vous pouvez aussi déposer un avis avec des étoiles sur iTunes ou votre application podcast. Merci encore à tous ceux qui continuent de soutenir Version Standard.

Je vous laisse avec une dernière version. Souvent je garde un dernier morceau plus ardu ou plus expérimental pour la fin, mais j’ai choisi de ménager vos oreilles pour la prochaine fois. On va revenir à la base, avec le premier enregistrement jazz de Green Dolphin Street. En 1957, avant même Miles Davis, Chet Baker le jouait en trio dans un enregistrement qui est resté caché dans les placards de son label pendant plus de 40 ans. Heureusement aujourd’hui on peut profiter tranquillement de sa version très lente et mélancolique de Green Dolphin Street.

Merci encore, je vous donne rendez-vous pour le prochain épisode.

C’était Version Standard, à bientôt.

Chet Baker – Embraceable You (1995, enregistré en 1957)