Critique du CD : Kristin Korb, Sweet Dreams

Sylvain

La chanteuse et bassiste Kristin Korb, basée à Copenhague, s'apprête à sortir son album hommage aux Eurythmics intitulé « Sweet Dreams » le 25 octobre 2024. Bien que je publie généralement mes critiques après la sortie officielle d'un album, au moment où j'entends pour la première fois la pré-sortie copie de « Sweet Dreams », je me suis senti obligé de prendre la plume et de partager mes impressions en toute hâte.

L'album contient 12 classiques d'Eurythmics réinventés, interprétés à travers le prisme du jazz de Korb. « Sweet Dreams » présente les collaborateurs de longue date de Korb, Magnus Hjorth au piano et Snorre Kirk à la batterie. L'album comprend également les contributions de l'harmoniciste danois Mathias Heise, du saxophoniste suédois Karl-Martin Almqvist, du tromboniste danois Steen Nikolaj Hansen et du percussionniste cubain Yohan Ramon. Cette sortie marque une fois de plus les efforts de Korb pour mélanger son expérience jazz avec le son emblématique des années 80 des Eurythmics, offrant de nouveaux arrangements et interprétations de chansons bien connues.

Son parcours pour créer un album hommage aux Eurythmics a commencé avec ses souvenirs de l'ère MTV, lorsque la voix puissante et les sons innovants d'Annie Lennox dominaient les ondes. La musique des Eurythmics a eu un impact significatif sur Korb pendant son adolescence, les performances de Lennox devenant des hymnes pour les jeunes femmes en quête d'autonomisation. Au départ, les Eurythmics n'étaient pas sur le radar de Korb pour un nouveau projet. En 2021, elle avait terminé un double album à l’époque de la pandémie, « What If / Why Not », qui mélangeait de nouveaux arrangements de morceaux pop avec des standards et, comme elle l’a déclaré, elle s’attendait à se concentrer sur la composition de nouveaux morceaux après la sortie de cet album.

Cependant, l'idée de l'hommage à Eurythmics est venue de manière inattendue lorsque le promoteur Amikam Kimmelman a contacté Korb au sujet de l'organisation d'un spectacle célébrant un duo de renommée mondiale pour une apparition au festival en octobre 2023. Face au choix entre The Carpenters et Eurythmics, Korb a choisi ce dernier, intriguée par le défi de trouver sa propre voix au sein du puissant héritage d'Annie Lennox.

Korb a abordé le projet avec l'intention de créer des arrangements qui s'adapteraient parfaitement à son groupe danois avec l'ajout d'un certain nombre d'artistes invités. Son processus créatif impliquait de se plonger dans le catalogue Eurythmics et de solliciter l'avis des fans. Korb a soigneusement sélectionné des chansons en lisant les paroles séparément de la musique pour s'assurer que les histoires résonnaient avec elle-même, adulte. Elle a fait de longues promenades en forêt tout en écoutant les morceaux originaux, permettant à son esprit d'explorer de nouvelles interprétations.

Pour développer ses arrangements, Korb a fait des esquisses de mélodies et d'accords de base, puis a délibérément évité de réécouter les versions originales. Elle a expérimenté différentes ambiances, tempos et changements d'accords pour créer des arrangements uniques. Korb a collaboré avec son groupe pour affiner et perfectionner chaque morceau, permettant à la musique d'évoluer au fil des répétitions et des performances.

L'approche de Korb pour arranger ces chansons bien connues est réfléchie et souvent surprenante. Par exemple, sa version de « Sweet Dreams » évite l’intro emblématique du synthétiseur, optant plutôt pour un clin d’œil plus subtil à l’original qui permet une plus grande interaction musicale. Cette décision donne le ton à l'album, démontrant la volonté de Korb de prendre des risques avec du matériel familier.

Kristin Korb | Photo de Sofie Barfoed

L'album bénéficie d'une programmation exceptionnelle de musiciens. Les collaborateurs de longue date de Korb, le pianiste Magnus Hjorth et le batteur Snorre Kirk, fournissent une base solide tout au long de l'ensemble. L'arrivée du virtuose de l'harmonica Mathias Heise apporte une dimension inattendue à des morceaux comme « There Must Be An Angel », où il réinterprète le solo original de Stevie Wonder avec une touche brésilienne.

Les morceaux remarquables incluent « Here Comes The Rain Again », où l'arrangement épuré de Korb met en valeur la mélancolie inhérente à la chanson, et « Sisters Are Doin' It For Themselves », qui fait l'objet d'une cure de jouvence énergique avec une intro inspirée de Charles Mingus.

Bien que les interprétations de Korb soient généralement réussies, certains auditeurs pourraient trouver que les arrangements enlèvent une partie de l'énergie brute qui rendait les originaux si convaincants. Cependant, cette approche permet une exploration plus profonde des paroles et du contenu émotionnel des chansons, révélant souvent de nouvelles facettes de morceaux familiers.

Le jeu de basse de Korb mérite une mention spéciale. Ses grooves sont solides et solidaires, fournissant une base solide au groupe tout en offrant également des moments de contrepoint mélodique à sa voix. Ce double rôle de bassiste et de chanteur confère à l'album un caractère unique, distinct des albums vocaux de jazz traditionnels. La qualité de production est élevée partout, avec un son clair et chaleureux qui permet à chaque instrument d'être entendu distinctement tout en se fondant dans un tout cohérent. La décision d'enregistrer certains morceaux en direct en studio ajoute une touche organique aux performances, capturant l'énergie et l'interaction des musiciens.

« Sweet Dreams » est plus qu'une simple collection de reprises ; c'est une réinterprétation réfléchie du catalogue Eurythmics à travers une lentille jazz. Les arrangements de Korb démontrent une profonde compréhension à la fois du matériel original et des traditions du jazz, ce qui donne lieu à un album qui devrait plaire à la fois aux fans d'Eurythmics et aux amateurs de jazz.

L'album met également en évidence la qualité durable de l'écriture des chansons d'Eurythmics. En dépouillant ces chansons jusqu'à leur essence et en les reconstruisant dans un contexte jazz, Korb met en valeur la force des mélodies et des paroles, prouvant leur polyvalence à travers les genres.

Dans l’ensemble, « Sweet Dreams » est un hommage réfléchi et bien exécuté qui devrait plaire aussi bien aux fans d’Eurythmics qu’aux amateurs de jazz. Les arrangements de Korb insufflent une nouvelle vie à ces classiques, offrant aux auditeurs la chance de découvrir des chansons familières sous un angle différent.

Liste des pistes :

1. Fais de beaux rêves | 2. Il doit y avoir un ange | 3. Voici à nouveau la pluie | 4. Nous sommes un | 5. Quand demain viendra | 6. Les sœurs le font pour elles-mêmes | 7. J'ai sauvé le monde aujourd'hui | 8. J'ai une vie | 9. Ne vous laissez pas abattre | 10. Est-ce que je te mentirais | 11. Mettez un peu d'amour dans votre cœur | 12. Levé

S'aligner:

Kristin Korb : Chant/Basse/Arrangement | Magnus Hjorth : Piano | Snorre Kirk : Batterie | Mathias Heise : Harmonica chromatique (#2,8,10,12) | Karl-Martin Almqvist : Saxophone (#1,3,6,8,12) | Steen Nikolaj Hansen : Trombone (#4,7,8,12) | Yohan Ramon : Percussions (#1,2,4,7,8,12)

Date de sortie : 25 octobre 2024
Format : CD | Streaming
Label : Musique de mouton géant

Rencontrez Sylvain, l'âme derrière Version Standard.

En tant que fondateur et éditeur en chef, Sylvain inspire et guide l'équipe avec une passion indéfectible pour le jazz. Ses contributions reflètent une vision claire et déterminée pour un média qui encourage l'appréciation, la découverte, et le respect des traditions du jazz. Sa connaissance profonde du genre et son dévouement à la culture du jazz l'ont amené à créer Version Standard en 2020, combler une lacune dans le paysage numérique et offrir aux amateurs du jazz une plateforme inclusive et exhaustive.